En cas de litige avec votre dentiste, il faut que vous sachiez que la justice fait une grande différence entre l’obligation de résultats et l’obligation de moyens.
Parlons un peu de déontologie.
Durant mes années d’études et mes 40 années d’exercice, la règle déontologique de notre profession a été que nous avions vis à vis de nos patients une « obligation de moyens mais pas une obligation de résultats ».
Cela veut dire que nous sommes obligés d’employer tous les moyens mis à notre disposition par la science, mais que nous ne sommes pas obligés de réussir.
Je pense qu’il est important que le grand public connaisse cette notion et qu’elle soit expliquée et commentée, et surtout de noter que son interprétation a évolué dans le temps.
Une lectrice est très en colère contre son dentiste car celui-ci lui a dévitalisé une dent et l’a couronnée et un an plus tard elle a fait un abcès très agressif et il a fallu extraire la dent. Le dentiste a argué que les canaux radiculaires étaient coudés et calcifiés, et qu’il n’avait pas pu les obturer correctement.
En tant qu’expert, j’ai une autre vision des faits.
Quand j’exerçais l’omnipratique, c’est à dire quand j’étais dentiste généraliste, il n’y avait pas de spécialités, sauf pour la stomatologie. Les dentistes faisaient tout: de l’orthodontie à la chirurgie et n’avaient recours au Stomatologue que très exceptionnellement.
On pouvait donc admettre qu’un canal radiculaire difficile soit mal obturé si on avait usé de tous les « moyens » pour le faire mais que le « résultat » n’était pas bon.
Je considère qu’actuellement un praticien, pour aller au bout des « moyens » dont il dispose, doit déléguer à un spécialiste, un travail qu’il sait ne pas pouvoir faire correctement, ou qu’il n’a pas réussi à faire correctement. Et c’est le spécialiste qui obtiendra un meilleur « résultat » que lui même.
Il ne peut donc pas poser une couronne sur une dent mal obturée sans avoir donné un choix au patient:
– Faire faire l’obturation par un endodontiste
– Ne rien faire et attendre un certain délai pour voir ce qui va se passer
– Prendre le risque de faire quand même la couronne mais en connaissance de cause.
Je trouve que la réclamation de la patiente est parfaitement justifiée. Son praticien aurait du au minimum l’informer que les canaux de cette dent étaient mal obturés.
Mon point de vue est essentiellement moral et éthique, car la jurisprudence actuelle évolue et il y a des nuances entre les soins et la prothèse, et en cas de litige, seuls les juristes professionnels spécialisés en professions médicales peuvent donner des conseils avisés.
Cette démonstration peut s’appliquer dans beaucoup de domaines où il y a une obligation de moyens et pas de résultats.